Subsides fossiles

Je dois à Thibault Laconde d’avoir repéré cette annexe du rapport sur les prix de l’Energie de la Commission Européenne. En effet, l’énergie joue un tel rôle dans nos vies, et dans nos économies, que tous les Etats se sont attelés à “maîtriser” celle-ci, ce qui signifie souvent: s’assurer qu’il y en aura assez pour les différents usages escomptés. Les différents états, et pas qu’européens, aident donc le secteur énergétique, tout comme ils aident les autres secteurs.

Ces aides prennent diverses formes: subventions directes par moment, mais surtout de l’aide sous forme de transferts indirects ou de réductions d’impôts. Sur l’année 2016 agrégée dans ce rapport, c’est quasiment 1500 dispositifs d’aide destinés à l’énergie pour un montant de 168 milliards d’euros: 75 milliards ont été affectés pour les énergies renouvelables, 55 à destination des énergies fossiles et 5 à destination du nucléaire. Si le fait de soutenir le développement de nouvelles formes d’énergie est souvent connu, le fait de continuer à soutenir les énergies “conventionnelles” l’est moins, et il me semblait utile de le remettre en évidence. (NB: le solde n’est pas classé par filière spécifique)

En Europe

Lorsqu’on compare la répartition des aides entre fossile ou renouvelable des différents pays européens comme Thibault l’a fait sur le diagramme ci-dessous pour la période 2008-2016, on se rend compte que la situation est très différente d’un pay à l’autre: “En République Tchèque, en Allemagne, au Portugal ou en Espagne, par exemple, la grande majorité des aides vont aux énergies renouvelables. Au Pays-Bas, en Hongrie ou à Chypre, au contraire, ce sont les fossiles qui dominent largement.”

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Aides aux énergies fossiles et aux énergies renouvelables dans l’UE28

La Belgique : on ne sait sur quel pied danser…

Lorsqu’on regarde le profil des aides belges, difficile d’y détecter une véritable tendance, hormis sans doute le fait que la progression constante de la part de renouvelable a été subitement interrompue en 2014.

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Total des aides en Belgique (extrait du rapport)

Ce qu’on peut surtout lire dans ces courbes, c’est une espèce de statu quo. En 2015 et 2016, comme en 2018, 55% des aides belges sont destinées à l’énergie fossile… comme si le monde n’avait pas changé. Il s’agit chaque année de 2,5 milliards d’euros.

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Aides en Belgique pour les énergies fossiles (extrait du rapport)

Les aides aux renouvelables ayant sensiblement progressé pour dépasser les 30% (1,5 milliard d’euros), on peut en déduire que ce sont les aides aux autres sources d’énergie (dont le nucléaire) qui ont légèrement diminué.

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Aides en Belgique pour les énergies renouvelables (extrait du rapport)

Cela me semble surtout traduire le fait que la Belgique n’a pas de vision claire quant à sa politique énergétique. Hors, les investissements en énergie requièrent des années pour être effectifs, et il serait donc temps d’opérer des choix et de garantir notre approvisionnement (et indépendance) énergétique. Si on ne regarde que la seule production d’électricité, en 2018 nous avons dû importer 21% de nos besoins d’autres pays… qui acceptent d’en fournir tant qu’ils n’en ont pas besoin eux en direct. Par contre, la RTBF communiquait ce 8 janvier sur le fait qu’en 2019, on aurait exporté plus d’électricité qu’on n’en a importé, et ce parce que la consommation aurait baissé tandis que… l’éolien off-shore aurait très bien produit.

Voilà un des points pour lequel il serait important d’avoir un gouvernement en 2020, si tant est qu’il mette ce point à son programme, qui structure clairement le futur énergétique de la Belgique. Vœu réaliste ou vœu pieux ?


Sources:
- Energie et Développement par Thibault Laconde
- L’étude sur les prix de l'énergie publié par la Commission Européenne en janvier 2019 : à partir de la page 400 se trouve en annexe une évaluation des aides accordées dans chaque pays de l'Union au secteur de l'énergie, avec leur décomposition par secteur, par énergie…
- Statistiques sur la production et la consommation d’électricité en Belgique fournies par la FEBEG
Photo de Zbynek Burival sur Unsplash, style que l'on appelle "toxic sublime"
Article migré début 2023 sur le nouveau site, sans les commentaires

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